“Aurélien a sauvé ou soulagé huit personnes…”
12/05/2016 — Sa maman raconte pourquoi elle a dit “oui” au don d’organes.
Cette journée de septembre 2007 devait être magnifique. Le temps était au rendez-vous. C’était un samedi de repos, si rare que je l’attendais avec impatience. Tout allait bien. Aurélien, qui était boucher, s’était levé à 10h00, avait pris son scooter et était parti. Les pompiers ont sonné à la porte trente minutes plus tard. D’un coup, je me suis sentie vidée. Je me suis dit : « Mon Dieu, faites que ce ne soit pas lui ! » Et puis le cauchemar a commencé.
Mon neveu est arrivé et nous as dit : « C’est Aurélien. Il a eu un accident !» Mon mari s’est immédiatement rendu sur les lieux. Je l’ai rejoint très vite et, là, j’ai vu mon bébé sur la route. J’ai couru vers lui et lui ai dit ces mots : « Je suis là, ça va aller… » Je lui ai pris la main, il me l’a serrée. Je suis une maman, j’ai pensé qu’il ne pouvait alors plus rien lui arriver. La douleur était tellement intense, j’avais tellement mal, mais j’ai espéré de toutes mes forces qu’il s’en sorte.
On nous a dit de rentrer et de rappeler le service de déchocage avant de nous rendre à l’hôpital. Lorsqu’on a téléphoné, on nous a suggéré de nous rendre au plus vite auprès de notre fils. Le trajet fut un vrai cauchemar. Une fois dans ce couloir du déchocage, le médecin nous a dit : « la médecine est impuissante, on ne peut plus rien faire, il est en état de mort encéphalique. Pensez au don d’organes ». Et il s’en est allé.
Nous étions dans un autre monde. Tout s’écroulait. Puis nous nous sommes rendus près de notre Ange. Tout semblait si irréel. Il respirait avec les machines, mais paraissait tellement vivant. Aurélien a ensuite été transféré dans un autre service de l’hôpital où nous avons ressenti toute la gentillesse, l’écoute et l’émotion des infirmières, aide-soignantes et médecins qui furent admirables. Mon époux et moi avons rencontré une infirmière de coordination, qui nous a expliqué avec beaucoup de douceur et de patience la situation et la suite de la procédure à envisager. Les sentiments de douleur et de colère se mêlaient, laissant place à une situation explosive et ingérable.
Nous sommes rentrés à la maison, tard le soir. Il fallait expliquer à Romain et Manon, nos deux autres enfants, et envisager avec eux la possibilité du don d’organes. Ils ont accepté tous de suite. Ils en avaient d’ailleurs déjà parlé entre eux et avec Aurélien. Mon fils avait également abordé le sujet avec moi, suite au décès de Grégory et de l’émission lui rendant hommage et évoquant le Don de Soi. Aurélien m’avait dit : « De toute façon, moi si je “crève”, tu peux tout donner. Je n’aurai plus besoin de rien ». Il ne comprenait pas que Grégory et comme lui malheureusement beaucoup d’autres personnes, puissent partir par manque de donneur. Et comme disait notre Ange : « Que la mort apporte la vie, c’est tout simplement magique ! »
Aurélien a sauvé ou soulagé huit personnes, et nous sommes fiers de lui. Aujourd’hui, nous nous battons pour l’information sur le don d’organes. Nous avons témoigné dans un documentaire, Six personnages en quête d’éthique et, avec la Fédération des Transplantés Isérois, nous aimerions monter une association pour les familles de donneurs car nous sommes dans le déni, alors que nous avons besoin de parler et de dire notre ressenti. Nous avons besoin d’aide. Pour finir, j’aimerais justement remercier toute les personnes qui nous ont aidés, dont l’Association Grégory Lemarchal qui a participé au financement du film, Advita le producteur, FTI et, surtout, tous les receveurs que l’on a rencontrés lors des conférences et qui sont particulièrement touchants.
La Maman d’Aurélien